lundi 17 septembre 2012

La question de l'emploi reste un sujet de tension majeur dans la fonction publique

COMMENT ne pas braquer les fonctionnaires et leur ouvrir des perspectives, quand on n'a pas les moyens de satisfaire leurs attentes en matière d'emploi ou de pouvoir d'achat ? A cette question qui s'est posée à ses prédécesseurs, la ministre de la fonction publique, Marylise Lebranchu, apporte, mardi 4 septembre, de premières réponses. Elle rencontre les syndicats de fonctionnaires au Conseil économique, social et environnemental (CESE) pour leur présenter l'agenda social de la fonction publique, c'est-à-dire la déclinaison concrète de la conférence sociale des 9 et 10 juillet. 

Mme Le branchu peut encore surfer sur un anti-sarkozysme qui reste vif chez les agents de l'Etat, déstabilisés par la révision générale des politiques publiques (RGPP) et par la réorganisation territoriale de l'Etat. Elle sait combien les fonctionnaires se sont sentis humiliés par l'ancien président et combien leurs syndicats apprécient le changement de ton, à leur endroit, du gouvernement. Dans l'agenda social, elle a pris soin de retenir des thèmes de négociation chers à tous comme l'égalité hommes-femmes, les conditions de travail, le dialogue social, les agents non titulaires ou encore la refonte des grilles. Les syndicats, de la CFDT à Solidaires, y sont sensibles, mais sans dissimuler leurs désaccords avec l'exécutif. 

L'optimisme n'est pas de mise en matière d'emploi. La promesse du premier ministre Jean-Marc Ayrault, en juillet, de " tourner le dos " à la RGPP a été trop vite suivie par des lettres de cadrage imposant, dans les ministères non prioritaires, une véritable rigueur de gauche. Stabilité des effectifs oblige, les 65 000 créations d'emploi dans l'Education nationale, dans la police et la justice, seront compensées par 20 000 suppressions de postes à la défense et par des redéploiements douloureux ailleurs. 

Les syndicats ont fait leurs calculs : ils savent que la fameuse " règle " sarkozyste du " un sur deux " (le non-remplacement de la moitié des fonctionnaires partant à la retraite) sera durcie dans les ministères non prioritaires. "

En réalité, la RGPP continue sur le fond comme sur la forme. Aux finances, à l'écologie, à l'agriculture et à l'intérieur sur les missions non prioritaires, 80 % des départs ne seront pas remplacés ", accuse Pascal Pavageau (FO), aussi inquiet des projets de mutualisation des effectifs des directions départementales interministérielles (DDI) et des préfectures. " Dans ce domaine, il n'y a aucune concertation. Les décisions sont prises en catimini ", dit-il. Même l'Unsa, modérée, reconnaît qu'" à un moment donné, cela va coincer sur l'emploi ". " Il y a de gros soucis à la pénitentiaire, à l'aviation civile et à l'agriculture. On peut comprendre la nécessité des redéploiements sur le plan budgétaire, mais syndicalement, cela ne passe pas ", assure Jean Grosset. 

Côté rémunérations, les syndicats redoutent la poursuite du gel du point d'indice et déplorent une baisse du pouvoir d'achat. La CFDT, peu suspecte de vouloir jeter de l'huile sur le feu, remarque qu'après les augmentations du smic en janvier et en juillet, il a fallu " remonter les bas de grille, de la catégorie C puis de la catégorie B, pour éviter qu'elles ne soient noyées sous le salaire minimum ". Aujourd'hui, un agent de l'Etat de catégorie B titulaire du baccalauréat débute au smic, un enseignant à 1 600 euros par mois. L'Union des fédérations de fonctionnaires CFDT regrette, comme ses homologues, que l'exécutif ne semble pas vouloir supprimer la journée de carence instaurée par le gouvernement Fillon en cas de maladie, qui rapporte 220 millions d'euros.

(Le monde / 05 septembre 2012)